Mardi soir sur le stade du Monteil. Il est 18 heures, il fait nuit. Le stade de foot en synthétique est éclairé. Des équipes de petitous jouent au ballon. Sur le terrain du haut, fréquenté par les benjamin(e)s et minimes de l'ACSM les jeudis soirs, Samuel Intilla entraîneur et lanceur ( il se définit comme un lanceur de javelot en pré-retraite ) et Mattéo Granger s'échauffent.

Puis ils passent aux fondamentaux : les bases des gestes du lancer de disque : la tenue du disque, les mains hautes, les pieds actifs ( tout vient du dessous ). Il faut réapprendre à organiser son lancer : d'abord le bas, puis le haut . Il s'agit de lutter contre l'envie de lancer avec le haut du corps uniquement.

Jusque là, depuis le début de la saison, ils avaient travaillé le poids pour préparer la salle et la compétition à Aubière le 8 décembre où Mattéo a jeté le 6 kilos à 9 mètres. La phase poids terminée, lui succède le disque.

L'albatros et les spaghettis

Il ne fait pas très chaud : 3°C.

Mattéo répète le geste que lui détaille Samuel à l'aide d'un chiffon. On parle d'albatros ( les bras écartés comme les ailes de l'oiseau ) et de spaghettis ( les bras relâchés et non pas raides ).

Grande difficulté : être fort des membres inférieurs et relâché du haut.

Ils tracent un plateau de lancer du disque.

Samuel explique les gestes du lancer à Mattéo qui exécute deux fois consécutivement : il dispose de deux disques. Puis Samuel à son tour jette un boulet de 2 kilos, mimant le geste du lancer de javelot. En cet endroit proche des jeunes footballeurs, il n'est pas possible de lancer le javelot. Il devra se déplacer en un autre lieu, à Saint-Étienne ou ailleurs.

Il faut s'adapter

" Le plus pénible, c'est l'absence d'installation. Une cage, c'est important. Un plateau, un butoir, c'est important. Une aire consacrée aux lancers c'est important pour s'isoler, pour penser technique.

Ici, on est obligé de faire attention aux gamins. On n'est pas super bien éclairé.

Les installations ne nous permettent pas d'être dans de bonnes conditions. On lance sur du goudron. Ce n'est pas plat. Ça glisse. C'est plutôt ça qui va gêner. On n'est pas des super gros spécialistes. Ce n'est pas gênant dans la performance finale, cela ne va tant nous handicaper que ça.

La troupe des lanceurs n'est pas très étoffée. D'ici le printemps va-t-elle s'agrandir ?

Stéphane Assié viendra certainement.

Et chez les filles ?

Chez les filles, ça m'étonnerait.

Ma femme va peut-être reprendre sa licence pour lancer le marteau mais ça reste entre guillemets.

Aux interclubs il va falloir du monde pour lancer

Il va nous manquer du monde de partout. Il ne nous manquera pas que des filles. Le problème pour les lancers est que les engins sont Seniors aux interclubs. Même si des jeunes se montrent quelque peu talentueux, demander à des " gamins " de lancer un poids de 7 Kg ou un disque de 2 kilos, à part les meilleurs meilleurs Français, ce sont de grosses contraintes.

Pour les lancers, il faut des mecs et des filles qui ont un petit peu de bouteille. Il faut des adultes.

Ça peut être cool de lancer des trucs dans l'herbe

Peut-on espérer avec le stade avoir de nouveaux athlètes ?

Oui parce que forcément cela nous donnera une autre aura. On sera plus visible. On aura des séances en commun sur le stade. Là, du fait du chantier, on s'est éparpillé. C'est pour la bonne cause, mais effectivement, c'est un peu fracturer le club.

Je pense qu'à l'avenir des gens se montreront un peu plus intéressés.

C'est aussi à moi de faire l'effort d'aller chercher les jeunes, leur montrer que ça peut être cool de lancer des trucs dans l'herbe. Même si de prime abord certains sont un peu récalcitrants, on se rend bien compte qu'avec la pratique les jeunes aiment bien. C'est ludique, c'est un bon exutoire, ça permet de se défouler.

 Travailler la vitesse et l'explosivité

Le programme d'entraînement jusqu'à la fin de la saison ?

Je vais le séparer en deux : on va faire une période de foncier, sans trop de compétition. Peut-être même pas du tout.

Le travail foncier : on va beaucoup travailler technique et on va travailler lourd, c'est-à-dire avec des engins plus lourds que des engins de compétition. Cela permet d'augmenter le volume des séances.

Mattéo ne s'entraîne qu'une fois par semaine en lancers. Il a besoin de faire du volume.

Après, en période estivale, ce sera plus léger. Il lancera ses engins de compétition, ceux de sa catégorie, voire en dessous pour travailler la vitesse, l'explosivité.

 Il faut s'habituer

Tout en répondant aux questions, Samuel observe le travail de Mattéo. Il commente ses gestes, lui fait parfois rectifier. De temps en temps il s'interrompt pour parler à son athlète qui lance le disque de 2 kilos, celui des Seniors.

- Super ! Génial ! Tu les fais tous comme ça et c'est bon.  

Celui des Juniors ( catégorie de Mattéo ) pèse 1,750 Kg. Il est surtout plus petit. Ce ne sont pas les mêmes leviers. La taille de l'engin le gêne. Il faut avoir de grosses paluches pour lancer ça ou bien il faut être habitué. Là, ça lui permet de s'habituer. C'est lourd, avec des contraintes de taille et de plateau, etc.

On apprend une langue étrangère

Quelle performance Mattéo peut-il espérer cette saison ?

Je pense qu'il peut faire mieux qu'avec le 1,5 Kg l'année dernière.

Mattéo vient de réaliser un joli lancer. Samuel s'interrompt pour le féliciter :

- Super !

Il a fait 27 mètres je crois l'année dernière au disque de 1,5 Kg. Je pense qu'il peut faire 28 à 30 mètres au 1,750 Kg ce qui serait super car, encore une fois, il ne s'entraîne qu'une fois par semaine. Il n'y a pas de miracle. À chaque fois il a le sentiment de reprendre un petit peu à zéro ses séances. C'est presque le cas parce qu'à ce niveau là c'est essentiellement du travail technique. Quelqu'un qui fait une heure d'anglais par semaine ne peut pas parler anglais au bout d'un an. C'est un peu pareil. On apprend une langue étrangère. Il faut pratiquer, pratiquer.

Aujourd'hui on est isolé

Ce sera là aussi la différence avec le stade. Ce qui manque aujourd'hui c'est d'avoir des séances multiples. D'avoir un groupe plus étoffé, c'est sûr, mais aussi plusieurs fois par semaine, travailler technique. Après, on va tout de suite changer de dimension. On va se frotter à des gens d'un niveau régional voire national. À c moment on changera complètement d'objectif. Déjà, de voir des gens qui sont vraiment forts, ça motive. Au jour d'aujourd'hui, on est isolé.

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